« Don’t feed the troll » est un dicton bien connu des Community Managers. Il signifie que, face à un internaute peu enclin au dialogue ou souhaitant simplement poser problème à la marque (ou au Community Manager qui se cache derrière), le silence est d’or.
Par nature, le « troll » souhaite simplement provoquer et lancer une discussion houleuse pour nuire intentionnellement à la marque ou juste s’amuser. Il n’est pas toujours évident de le détecter au premier abord. Bien souvent, son commentaire exprime un mécontentement classique et le Community Manager essaie alors de résoudre un souci qui s’avérera fictif.
En d’autres occasions, il est repérable à mille lieux, grâce à un ton parfois grossier, une orthographe douteuse et/ou une remarque farfelue. Le conseil le plus répandu est donc de purement l’ignorer.
Mais plusieurs marques ne l’entendent pas de cette oreille et savent brillamment gérer ces internautes en quête de querelles.
Entre mimétisme, tendresse, humour et répartie cinglante, découvrons comment Bouygues Telecom, la SNCF, Innocent, Burger King, iTélé ou encore Edilivre répondent aux trolls.
1) Bouygues Telecom
Commençons par l’opérateur téléphonique Bouygues Telecom. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le compte Twitter doit régulièrement faire face à un afflux d’utilisateurs mécontents, qui demandent de l’aide au Community Manager.
Dans d’autres cas, Bouygues Telecom se retrouve face à des internautes un peu taquins, comme cette femme qui souhaite changer d’opérateur, à condition que celui-ci lui offre le dernier smartphone de chez Samsung.
Le Community Manager choisit de répondre avec humour :
Ce qui n’a pas manqué de faire rire l’internaute et finalement, de montrer aux autres twittos que Bouygues Telecom sait être à l’écoute de ses potentiels clients, même s’il ne peut répondre à toutes leurs demandes.
Nous pouvons également prendre cet autre exemple, appartenant à la catégorie des trolls qui ne se détectent pas immédiatement. Un utilisateur semble rencontrer un problème avec sa box, ce qui enjoint immédiatement le Community Manager à répondre pour trouver une solution. Dans ce cas, nous remarquons qu’il s’adonne à la technique du mimétisme en reprenant le « langage » de l’internaute.
Sauf qu’après avoir répondu à côté de la plaque, l’internaute reconnaît finalement qu’il est chez Free. Ce qui n’empêche pas la marque de répondre avec le sourire.
Comme Bouygues Telecom reste de marbre, le troll tente encore une provocation qui sera à nouveau gérée avec beaucoup d’humour :
2) SNCF
Sur les réseaux sociaux, la SNCF doit souvent affronter le mécontentement des voyageurs. Si certaines plaintes sont justifiées, le service doit parfois faire face à des commentaires douteux et de la mauvaise foi caractérisée.
Prenons l’exemple de cet utilisateur qui se plaint d’avoir été réveillé par un – nous citons – « putain de contrôleur » et accuse même l’entreprise de le faire exprès. Face à ce tweet, la SNCF aurait pu rester impassible et l’ignorer, il n’y avait pas de réel enjeu à répondre.
Cependant, la société de transport a quand même défendu son personnel et avec le sourire !
La SNCF reçoit couramment des demandes farfelues, notamment pour avoir des billets gratuits.
Dans l’exemple ci-dessous, l’institution aurait pu choisir d’ignorer, mais au vu de la popularité du tweet de l’internaute (+ 1 300 retweets), cela aurait été dommage de ne pas rebondir dessus. La SNCF va alors répondre avec humour et une pointe de troll :
Le Community Manager montre ainsi qu’il ne se laisse pas impressionner par les internautes et qu’il a de la répartie. Ce qui peut éventuellement éviter que d’autres twittos ne se mettent aussi à troller pour le plaisir et à lui faire perdre son temps.
Enfin, prenons un dernier exemple de la SNCF qui concerne une fraude. Un utilisateur se vante, avec une vidéo pour preuve, de ne pas payer son billet. Celle-ci est illustrée d’un message « bah jui povr » que nous pourrions traduire par « je suis pauvre ».
Là encore, le Community Manager ne se laisse pas abattre et lance un trait d’humour sur les baskets portées par le fraudeur, tout en lui rappelant le montant des amendes pour fraude.
3) Innocent
La marque Innocent surfe volontairement sur son image mignonne, fun et enfantine. Ses tweets ont donc cette teneur innocente et rigolote que les internautes aiment ou détestent ! Même si la stratégie social media de la marque de jus de fruits est généralement saluée par les consommateurs et ses confrères, il arrive que certains trolls s’en prennent à son compte Twitter.
Le Community Manager doit donc adopter une réaction qui reste en adéquation avec sa ligne éditoriale et ne céder à aucun mimétisme ou aucune vulgarité. Ainsi, lorsqu’un internaute réagit mal à une de ses blagues, Innocent retourne sa frustration contre lui en acceptant sans contester sa remarque.
Que répondre après une telle réaction ?
4) Burger King
Burger King est le roi de la blague, de l’humour et de l’ironie. Le problème est que cela ne plaît pas toujours à sa communauté ou n’est simplement pas bien compris. Par conséquent, certains internautes se transforment en « Captain Obvious » et veulent mettre l’enseigne face à ses erreurs pour la ridiculiser.
Sauf que le Community Manager a réponse à tout et, comme Innocent, il répond pile dans le ton qui convient à sa stratégie.
Sur Facebook, Burger King partage une publication qui fait référence au fait que l’Homme soit l’inventeur du feu.
Ce qui ne semble pas être l’avis de l’un de ses abonnés qui se permet de dire que le feu ne s’invente pas. À cet instant, un autre membre de la communauté de Burger King lui répond, avant que l’enseigne surfe sur sa réponse pour montrer que le commentaire est ridicule et bien trop premier degré…
Dans un autre post, la marque communique sur la possibilité d’être un client « chiant », c’est-à-dire de pouvoir ajouter ou supprimer des ingrédients dans les burgers de la carte.
Une telle proposition n’échappe aux trolls qui se permettent donc de commenter en demandant l’impossible, comme un burger dans le burger. Comme toujours, l’enseigne trouve une répartie décalée pour mettre fin à la conversation le plus rapidement possible.
5) iTélé
Comme autre exemple, nous pouvons aussi citer iTélé. Même si ses réactions sont rares, il faut saluer le courage de la chaîne qui sort délibérément de sa ligne éditoriale pour parfois répondre aux trolls.
Elle, qui arbore toujours un sérieux et un professionnalisme impeccable dans chacun de ses tweets, se permet de complètement digresser en s’adonnant au mimétisme, comme dans cette réponse à un utilisateur Facebook qui a quelques soucis avec la lecture et l’écriture.
iTélé sait aussi manier l’humour visuel et lorsqu’un internaute commente de manière insolite une de ses informations :
La chaîne sort une image très drôle, illustrant sa réaction face au troll. L’internaute en perd sa répartie du coup…
L’exemple d’iTélé prend finalement le contre-pied de Burger King et Innocent en sortant totalement de son ton habituel. Nous pouvons supposer que ce regain d’humour a pour vocation à démontrer aux trolls que, même si l’entreprise est d’une nature sérieuse et professionnelle, elle sait aussi se défendre en utilisant les codes jeunes et modernes du digital.
6) Edilivre
Gérer le compte Twitter d’une maison d’édition n’oblige pas à une politesse absolue, ni à adopter un langage politiquement correct à chaque fois. Le Community Manager d’Edilivre le démontre en s’adaptant très bien au type de troll qu’il a en face de lui.
Le compte Edilivre analyse le profil de l’internaute moqueur avant de délivrer sa réponse. Nous pouvons ainsi observer des réparties cinglantes, d’autres drôles et certaines simplement informatives.
Commençons en douceur par un internaute qui accuse Edilivre de s’adonner à des pratiques marketing sans succès. La maison d’édition se contente simplement et poliment de montrer en image qu’il se trompe.
Certains trolls manient l’ironie à la perfection et en abusent dès qu’ils peuvent. Face à ce type d’internaute, Edilivre adopte alors le même comportement. Un moyen rapide et efficace de faire sourire la communauté, tout en montrant au troll que la marque ne se laisse pas faire.
Quand l’internaute est plus tenace et semble vouloir rentrer dans un débat sans fin, Edilivre joue alors la carte de l’insolence. Au final, elle reprend le ton condescendant de son interlocuteur en espérant le faire taire.
Enfin, c’est rare, mais il arrive à Edilivre de traiter le mal par le mal, notamment face à un commentaire raciste, comme celui-ci :
Plutôt que de l’ignorer ou de tenter un trait d’humour, l’entreprise va directement au but avec une réponse aussi drôle que grossière :
Cette stratégie est à double tranchant. Elle doit vraiment être utilisée dans un cas totalement justifié où le commentaire est réellement haineux ou méchant. Dans le cas contraire, le Community Manager risque de susciter un bad buzz et c’est l’image de la marque qui va en pâtir.
En tout cas, il semble que pour Edilivre, cette réponse a été massivement saluée. Il suffit de voir que le tweet a généré 295 RT et 241 j’aime. Quant aux réactions, elles sont majoritairement positives.
Plus la marque est connue, plus le risque d’attirer des trolls est important ! Il est nécessaire de se préparer à ce genre d’internautes pour pouvoir apporter des réponses claires et efficaces, qui stopperont tout débat inutile et éviteront un débarquement massif de commentaires taquins.
Selon votre activité, votre ligne éditoriale et votre profil de clientèle, vous aurez le choix entre l’humour, la preuve, le mimétisme ou l’ironie. Dans tous les cas, il convient de ne jamais céder à la colère ou à la grossièreté (sauf cas très très exceptionnel), car c’est bien souvent l’objectif du troll.
En cas de doute ou de manque d’argument, suivez le dicton phare des Community Managers : « Don’t feed the troll » !
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Formateur & consultant social-média depuis 2011, je suis l’auteur de 4 livres aux Editions Dunod sur la thématique des Réseaux Sociaux et du Community Management.
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