Lorsqu’on parle des réseaux sociaux à des dirigeants d’entreprises, il est fréquent de faire face aux éternels clichés qui ont encore parfois la vie dure : perte de temps, inutile dans mon activité, trop ludique, pas assez sérieux, peur de ne pas maîtriser ce qu’il s’y dit, aucun intérêt…
Pour ceux qui n’ont pas pris le train en marche, il semble que l’adoption tardive des réseaux sociaux en entreprise soit difficile. C’est logique. Plus on a pris du retard, plus l’actualité des réseaux – en ébullition permanente – évolue, et plus la tâche semble insurmontable.
Et pourtant, la tendance est en train de changer.
Lentement mais sûrement.
Le tendance nous vient de l’étude de l’agence Weber Shandwick (téléchargeable ici) qui révèle que 28% des PDG des 50 plus grandes sociétés du Fortune 500 utilisent à présent les réseaux sociaux. Ce chiffre peut sembler peu élevé, mais c’est un taux qui a doublé en deux ans. En toute logique, Linkedin arrive en tête des réseaux les plus utilisés par ces grands patrons, loin devant Twitter. Facebook, quant à lui est aux abonnés absents.
Il n’est pas ici question d’extrapoler une étude portant sur les plus grandes entreprises internationales au monde de l’entreprise en général, mais pourtant, bien des enseignements peuvent intéresser les community managers, les directeurs communication et marketing qui ont parfois du mal à convaincre leur patron d’être présent sur les réseaux sociaux. Sans compter sur les directeurs généraux eux-mêmes qui peuvent, tout à fait légitimement, avoir des doutes sur la démarche. Pour vous aider, voici quelques bonnes pratiques indispensables pour créer, développer ou asseoir la présence des patrons sur les réseaux sociaux.
1) Définir un objectif et choisir ses cibles
Vous connaissez la maxime “on ne saurait faire boire un âne qui n’a pas soif” ? Si votre patron est à 100% réfractaire aux réseaux sociaux en général, inutile d’arriver avec un plan d’actions complet, des suggestions de contenu et des idées sur ses futurs statuts. Il faut commencer à faire bouger les choses tout en douceur, sans le brusquer, avec une bonne dose de pédagogique et de tact.
Et pour cela, trois sessions de formation express de 15 à 30 minutes maximum sont indispensables pour attirer son attention. Lui présenter les choses positivement. Dédramatiser et intéresser. Les directeurs ont rarement du temps, c’est à vous d’être bref et concis :
- une première session pour faire un bref panorama des réseaux sociaux : qui sont-ils, quelles sont leurs différences, quelles sont leurs spécificités et que peuvent-ils apporter à l’entreprise (image, notoriété, affaires, communication…)
- une seconde pour faire un point sur la concurrence ou les bonnes pratiques dans l’industrie. Si le patron de votre concurrent direct est déjà actif en ligne, il y a de bonnes chances que cela soit un levier efficace pour convaincre le vôtre. A défaut, vous pouvez prendre n’importe quel autre exemple de patron.
- une dernière pour commencer à se projeter dans le futur avec la mise en place d’un calendrier et d’un accompagnement personnalisé sur un premier réseau pour commencer (Twitter, Facebook ou Linkedin, à vous de choisir par rapport à votre stratégie).
Une fois votre directeur réceptif à l’usage des réseaux sociaux, c’est le moment de définir vos objectifs et de choisir vos cibles. Concrètement, il s’agit de savoir quoi dire, comment le dire, quand le dire et à qui le dire.
Souhaitez-vous que votre patron parle d’un sujet en particulier ? Qu’il commente l’actualité ? Qu’il partage des informations sur vos produits et services ? Qu’il engage la conversation avec les internautes ? Qu’il soit celui qui annonce les informations officielles ?
Pour prendre connaissance de bonnes pratiques à l’échelle française, nous vous invitons à lire un de nos anciens articles sur le sujet : 4 patrons français qui font rayonner leur marque sur les réseaux sociaux.
Même si la tendance reste à la prudence du côté des grands patrons, certains sortent vraiment du lot et contribuent à valoriser les entreprises qu’ils dirigent. Notons à ce titre, le trublion Richard Branson, avec plus de 13 300 tweets et 8 millions d’abonnés (https://twitter.com/richardbranson), John Legere, PDG de T-Mobile (https://twitter.com/johnlegere) ou encore Stephen Kelly, Patron de Sage (https://twitter.com/skellyceo).
2) Utiliser la vidéo
L’instantanéité des réseaux sociaux peut parfois faire peur aux dirigeants. Il faut être réactif, humain, direct, voire drôle et empathique. Les Community Managers le savent bien, il n’est pas toujours facile de répondre à son public. Or, votre patron n’est et ne sera jamais un Community Manager. Ce n’est ni son rôle, ni son objectif. Il doit au contraire être complémentaire avec votre stratégie digitale.
Néanmoins, dans cet exercice, la vidéo peut jouer un rôle important. Les avantages sont multiples : c’est facile à partager, on prend le temps de scénariser un discours et une intervention, on peut faire plusieurs prises, recommencer, et le tournage, qu’il soit fait en interne ou en externe, fait qu’il est entouré de professionnels sur cet exercice.
La vidéo peut prendre différentes formes : des voeux de bonne année, à l’annonce des résultats trimestriels en passant par la sortie d’un nouveau produit, d’une réaction à un changement stratégique ou d’un soutien à une grande cause. Sans forcément avoir de grands moyens, la vidéo de votre patron sera un bel outil qui pourra être facilement partagé et diffusé, tant que l’exercice est bien préparé avec un minimum de compétences techniques.
Enfin, autre option : le live face à des internautes ou des journalistes qui peut être filmé et retransmis en direct via Periscope, Meerkat ou Youtube.
3) Savoir communiquer différemment
Loin des canaux de communication institutionnels habituellement trop lisses et sans saveur, nous devons retrouver dans ces messages, une forme d’expression nouvelle, plus personnelle et plus directe. Nous ne sommes pas sur de longs discours où les valeurs de l’entreprise sont souvent ressassées à l’extrême. On est dans une catégorie où l’on doit découvrir la femme ou l’homme derrière le statut. Plusieurs exercices peuvent s’y prêter. Quelques exemples :
- organiser un AMA (ask me anything) où les internautes posent leur question à l’avance sur un forum et votre patron y répond durant une fenêtre précise de temps. Cela peut prendre la forme d’un live-tweet avec un hashtag particulier, d’un direct YouTube ou Periscope.
- l’entreprise côté coulisse : à l’aide de courtes vidéos type Vine ou de photos, on peut y découvrir l’envers du décor d’une usine, d’un bureau ou d’un événement.
- vie quotidienne : déplacement, rencontres, voyages d’affaires, tous les événements dans la vie d’un patron sont aussi l’occasion de communiquer et de le rapprocher d’une vie quotidienne qu’il devrait prendre le temps de partager.
Le compte Twitter ou Facebook de votre patron ne doit pas être un copier/coller de celui de l’entreprise. Il est indispensable d’avoir une ligne éditoriale différente et clairement établie. Il peut, bien sûr, retweeter certaines informations, mais là aussi avec parcimonie. On doit clairement se poser la question de la valeur ajoutée : pourquoi devrait-on suivre ce dirigeant sur les réseaux sociaux ? Que peut-il m’apporter ? Que vais-je en apprendre ? Comment va-t-il fédérer, à sa manière, sa communauté ?
Le style naturel, les capacités de communication et l’esprit de la “marque personnelle” de votre patron doivent clairement être étudiés, définis et établis pour ne pas se marcher sur les pieds.
Sa présence doit servir la marque et l’entreprise à travers son prisme personnel.
Un très bon exemple illustrant ce 3ème point est Gary Vaynerchuk, CEO de VaynerMedia.
Il anime une web-série nommée #AskGaryVee dans laquelle il répond à de nombreuses questions de sa communauté.
Il communiquera d’autre part sur son compte Instagram des pensées personnelles sous la forme d’images afin de respecter l’usage de la plateforme :
4) Communiquer avec ses salariés et les parties prenantes de l’entreprise
En fonction de la taille de l’entreprise, les réseaux sociaux peuvent aussi être complémentaires à des outils de communication interne. Il ne s’agit pas de les remplacer, mais bien de profiter de toutes les occasions qui sont offertes pour communiquer et se rapprocher de ses salariés et des parties prenantes de l’entreprise.
Un message de félicitations, une information à partager, un complément d’information à apporter, un message personnel… c’est l’occasion d’une communication top-down directe, sans barrière et sans langue de bois.
C’est par exemple le cas ci-dessous avec le tweet de John Legere, CEO de T-Mobile, félicitant les équipes de Brooklyn et du Queens :
5) Développer les relations avec les médias
Autre argument que votre patron peut entendre : les relations presse. En tant que dirigeant, il est le principal point d’entrée lorsqu’il s’agit de communiquer avec la presse. Or, bien qu’il ne s’agisse pas d’éviter le filtre du bureau de la communication ou des relations avec les médias, un journaliste pourra plus facilement contacter et communiquer avec votre dirigeant.
Une approche gagnant-gagnant qui permet de votre côté d’étoffer votre relationnel, de valoriser le travail de l’entreprise dans les médias et de créer une image plus positive et plus durable dans les relations avec la presse.
C’est le cas par exemple de Maurice Lévy pour cette interview réalisée par le magazine Influencia :
6) Promouvoir l’attractivité de l’entreprise pour de futurs employés
L’image de marque d’une entreprise ne passe pas que par ses clients et son chiffre d’affaires. En attirant les futurs talents, l’entreprise saura prospérer efficacement.
C’est ici que votre patron a un rôle à jouer. Il doit pouvoir partager des bonnes pratiques, s’afficher aux côtés de ses employés, promouvoir ce qui fait les caractéristiques fondamentales de la culture d’entreprise, sans tomber dans le traditionnel discours des valeurs et des missions. En développant une culture web forte, il sera plus facile d’attirer les nouvelles jeunes recrues. En rassurant sur la solidité et la stabilité de l’entreprise, il sera plus aisé de rassurer les employés et d’en attirer d’autres.
En promouvant un état d’esprit positif, il sera possible de créer un climat de confiance propice à la promotion de l’attractivité de votre entreprise pour vos futurs employés. Ce ne sont pas les réseaux sociaux qui font la culture d’entreprise. Elle existe de facto. Mais ils vont permettre de la disséminer plus rapidement, de la communiquer plus facilement et de capitaliser dessus.
7) Savoir répondre directement et efficacement en cas de crise
Anticiper une gestion de crise, c’est comme avoir une assurance. On paie pour quelque chose dont on espère n’avoir jamais besoin. Or, lorsqu’un problème survient, il faut être préparé. Et la puissance des réseaux sociaux est une solution, qui peut également être vue comme une menace par votre patron, qui craint probablement débordements, critiques et commentaires négatifs.
Pourtant, il n’existe pas d’outils plus puissants que ces réseaux pour circonscrire, communiquer, rassurer ou valider un événement ou une information. Et le compte Twitter de votre dirigeant doit être en première ligne en cas de problème. Il devra annoncer les dernières informations et diriger les clients ou parties prenantes sur le compte adapté. Il devra montrer qu’il s’implique et participe directement à la gestion de la crise en prenant toutes les précautions d’usage en termes de communication.
Il n’est d’ailleurs pas inutile de travailler par avance sur quelques simulations, une à deux fois dans l’année. Au même titre que les forces de l’ordre ou les pompiers qui s’entraînent régulièrement, vous devrez aussi vous entraîner pour savoir comment communiquer en cas de problème. Une explosion dans une usine, une client intoxiqué, un accident du travail, un ancien salarié s’estimant lésé, une fuite de projets stratégiques…
Tous ces scénarios peuvent servir à tester la solidité de votre dispositif et montrer que votre patron sur les réseaux sociaux maintient le cap, est présent, s’investit et s’active, dans toutes les situations.
Vous l’aurez donc compris, la présence d’un responsable d’entreprise sur les réseaux sociaux revêt des composantes bien plus diverses et variées que la simple image de l’entreprise. Il doit être un ambassadeur convaincu et participer ainsi à la stratégie de communication globale de celle-ci.
Cela peut prendre du temps, en fonction de l’envie et de la sensibilisation de votre patron aux nouvelles technologies, mais si vous parvenez à le motiver, ce sera, sans aucun doute possible, un accélérateur et un levier de croissance supplémentaire pour la communication de l’entreprise.
Lors de la crise du porc, Michel-Edouard Leclerc s’est exprimé sur son blog afin de donner son point de vue ainsi que sur la position de la franchise sur la situation :
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Formateur & consultant social-média depuis 2011, je suis l’auteur de 4 livres aux Editions Dunod sur la thématique des Réseaux Sociaux et du Community Management.
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